Apprendre au chien à être propre, c’est à dire à respecter l’hygiène de l’environnement humain dans lequel il vit, est une nécessité. C’est aussi un cas particulier de l’apprentissage de l’interdiction.
On n’apprend pas au chien à être propre.
Cela semble un paradoxe avec ce que je viens de dire. Ce n’est qu’un paradoxe apparent. Le chien est propre au sens canin du terme lorsqu’il ne salit pas les lieux de couchage, de repas et de boisson. Généralement il respecte aussi les aires de jeu, mais ce n’est pas obligatoire. Si votre chien urine dans son panier, à côté ou dans sa gamelle, dans son eau de boisson, consultez un(e) vétérinaire comportementaliste. Un diagnostic et un traitement sont impératifs.
Les techniques décrites ci-dessous sont efficaces pour un chien propre au sens canin du terme.
Être propre, c’est quoi ?
Dans la représentation populaire, un chien est propre lorsqu’il respecte l’environnement humain, c’est à dire lorsqu’il ne salit pas l’appartement ou la maison.
Ne pas uriner sur le tapis !
La technique d’éducation utilisant correction du comportement qui provoque des nuisances et récompense du comportement adéquat est efficace.
L’éducateur corrige le chien au moment même où il urine sur le tapis et il le récompense juste après qu’il ait uriné dans un endroit convenant, sur l’herbe du jardin, sur la plaque d’égout en bord de rue.
Le chien comprendra bien vite quel est son intérêt.
J’ai pris l’exemple du tapis, mais on peut généraliser cela à l’appartement ou à la maison. Le chien ne doit pas uriner dans l’appartement. Il doit uriner à un endroit convenant et convenu, à savoir dehors, ou sur la terrasse si on habite au sixième étage ou si le chien est jeune ou vieux et ne peut retenir ses urines très longtemps.
Ne pas uriner dans la maison ! Les mêmes techniques sont d’application pour le respect de la maison.
Que faire si on est absent quand le chien urine ?
La correction n’est plus possible. Seule la récompense est admise.
De nombreux éducateurs sont bien évidemment fâchés lorsqu’ils rentrent chez eux et voient l’appartement souillé. Ils laissent parfois aller leur colère et crient, se fâchent, punissent le chien. Ou, sachant qu’ils ne peuvent punir, ils serrent les dents, serrent les poings, et marchent de façon rigide en jetant un œil noir au chien qui se terre dans un coin de pièce ou derrière un fauteuil. Impossible de mentir à un chien ; le langage corporel de l’éducateur trahit son courroux et le chien adopte des postures basses, d’apaisement et de soumission, afin de ne pas subir de punition.
Si le chien dont on a respecté les besoins naturels élémentaires (il est sorti jusqu’à ce qu’il ait vidé vessie et intestin, il a eu l’opportunité d’exercer sa musculature, de promener et de courir) urine en absence du propriétaire, il vaut mieux consulter un(e) vétérinaire comportementaliste afin de déterminer si le chien ne souffre pas d’une pathologie physique (rein, foie, diabète, …) ou comportementale (anxiété, etc.).
Comment apprendre au chiot à être propre ?
La technique est la même que pour un chien adulte. Cependant, il faut être beaucoup plus vigilant parce que le chiot contrôle mal les sphincters de la vessie et du rectum. Il faut donc le sortir beaucoup plus souvent.
Le développement du contrôle des sphincters chez le chiot.
A la naissance, les éliminations urinaires et fécales sont déclenchées par le léchage du périnée (la région anogénitale) par la mère. Les éliminations sont réflexes.
Vers 2 à 3 semaines, elles deviennent spontanées.
Dès 3 semaines, le chiot sort du nid pour éliminer (propreté du nid).
Dès 8 semaines, les lieux d’élimination sont devenus spécifiques et préférentiels, à distance des lieux de couchage et d’alimentation. Cette préférence va se confirmer dans les semaines suivantes. Elle est facilité par la possibilité l’éliminer sur un support absorbant : sable, paille, terre, … Il s’agit d’un véritable conditionnement. En effet, vers l’âge de 8 semaines, le chiot associe les lieux et les surfaces avec le comportement excrétoire: désormais la vue ou l’odeur de ces endroits de toilette déclenchent le besoin d’éliminer.
A 15 semaines, cette préférence de substrat et de lieu d’élimination est quasiment définitive.
Le comportement d’élimination est précédé d’une marche le nez au sol à la recherche des odeurs des éliminations précédentes; la découverte des odeurs active le réflexe d’élimination.
Évolution de la séquence d’élimination: du réflexe biologique au conditionnement
De 3 à 5 semaines | Après 4 semaines | Après 8 semaines |
Réflexe spontané | Séquence complète | Séquence conditionnée |
Pression dans la vessie | Pression dans la vessie | – |
Agitation | Agitation | – |
– | Déambulation nez au sol | – |
– | Découverte d’odeurs d’éliminations | Découverte d’odeurs d’éliminations |
Prise de la position accroupie | Prise de la position accroupie | Prise de la position accroupie |
Élimination | Élimination | Élimination |
Soulagement | Soulagement | Soulagement |
Éloignement du lieu des toilettes | Éloignement du lieu des toilettes | Éloignement du lieu des toilettes |
Retour au nid, jeux, etc. | Retour au nid, jeux, etc. | Retour au nid, jeux, etc. |
Combien de temps un chiot peut-il se contrôler ?
Le chiot élimine toutes les heures en journée et toutes les 3-4 heures durant la nuit. S’il ne dispose pas de beaucoup d’espace et ne peut pas retrouver un lieu d’élimination adéquat, le chiot de plus de 4 à 5 semaines va tenter de contrôler ses sphincters et il va se « retenir » pour ne pas souiller les lieux de couchage.
C’est donc déjà chez l’éleveur que se développe la préférence pour le substrat et le lieu d’élimination. Lors d’une acquisition à l’âge de 7-8 semaines, c’est chez l’acquéreur que ces choix vont se confirmer.
Exiger une propreté impeccable.
Comment va-t-on procéder pour apprendre au chiot à ne pas éliminer dans la maison?
Voici la procédure la plus aisée.
1- Déterminer un ou plusieurs lieux adéquats d’élimination, à distance (un mètre minimum) des lieux de couchage et d’alimentation; les toilettes du chiot doivent être aisément accessibles.
2- Choisir un substrat convenable et absorbant; et pourquoi pas un grand bac à litière (comme on le fait pour les chats, mais adapté à la taille du chiot).
3- Limiter l’espace disponible pour le chiot laissé sans surveillance; l’espace disponible sera le lieu de couchage, le lieu d’alimentation et les toilettes.
4- Quand le chiot est sous l’œil vigilant des propriétaires, observer le comportement de recherche du lieu de toilettes et, au moindre signe suspect, y emporter le chiot. Récompenser après qu’il y ait éliminé.
5- Si le chiot élimine dans un lieu inconvenant, stopper l’élimination en portant le chiot et en le conduisant à ses « toilettes ». Inutile de se fâcher. La colère n’est pas éducative.
6- Dès l’âge de 8 semaines, et malgré l’utilisation de toilettes à la maison, le chiot doit apprendre à utiliser les caniveaux, la terre ou l’herbe des jardins, … Cet apprentissage doit être effectué avant l’âge de 15 semaines.
7- Sortez-le la nuit une ou deux fois pendant quelques semaines. Ne demandez pas au chiot de se retenir plus de six heures d’affilée.
8- Sortez-le toujours par le même accès, la même porte. Ne le sortez pour jouer et se promener qu’après avoir éliminé, sinon il demanderait constamment à sortir pour toutes sortes de raisons.
9- Ne l’encouragez pas à aboyer pour demander à sortir: l’aboiement n’est pas fiable et peut conduire à d’autres habitudes indésirables. Le chiot qui doit sortir va se mettre devant la porte (toujours la même, conservez le rituel) et gémira, miaulera, en grattant de la patte antérieure. Encouragez ce comportement en le récompensant.
La technique est simple et efficace. On peut l’utiliser autant en appartement qu’en maison avec jardin. Elle permet d’éviter les drames de la malpropreté, source d’insatisfactions et de rejet du chiot.
Que se passe-t-il si on fournit au chiot des papiers journaux pour éliminer?
Les papiers journaux sont peu absorbants; ils laissent filtrer des odeurs et des salissures sur le sol qui s’en imprègne. Le chiot se conditionne au lieu de toilettes et chaque fois qu’il y passe, l’odeur active le réflexe d’excrétion.
Une fois passé l’âge de 15 semaines et malgré l’enlèvement des journaux et les tentatives d’apprentissage pour le faire éliminer dehors, le chiot se « retient » tant que possible, malgré des heures de promenade, pour se « soulager » à la maison. Les propriétaires ont tout simplement conditionné le chien, bien involontairement, à utiliser des « toilettes » dans la maison. Et le chien s’y tient!
Si le chiot ne peut pas être sorti fréquemment, on peut lui apprendre à éliminer sur des journaux. Voici la procédure la plus simple:
1- Empilez des feuilles de journal sur un plastique ou dans une petite caisse basse pour en faire le lieux des toilettes du chiot.
2- La pile de journaux (désormais ses toilettes) doit être située à distance de la couche et de l’endroit où le chien mange.
3- Entraînez le chiot à éliminer sur les journaux de la même façon que vous l’auriez fait pour des toilettes situées à l’extérieur.
4- Quand vous changez les feuilles de papier journal, celles du dessous doivent être placées au-dessus des nouvelles pour évoquer, par l’odeur des phéromones, la réitération de éliminations.
5- Ne lui permettez l’accès à toute la maison que lorsqu’il élimine sans faute sur les journaux et faites-le progressivement.
6- Les papiers peuvent être déplacés graduellement vers la porte et déposés à l’extérieur pour habituer le chien à éliminer dehors, par approximations successives.
Cette manière de faire vous permet peut-être de dormir la nuit mais ralentit l’apprentissage de la propreté.
Garder le chiot dans sa chambre active-t-il l’apprentissage de la propreté?
C’est exact. Cela permet
- de limiter l’espace disponible pour le chiot
- de l’entendre gémir la nuit lorsque lui vient le besoin d’excréter, ce qui nécessite de se lever et de le conduire à ses « toilettes ».
Combien de fois faut-il sortir le chiot pour qu’il puisse « faire ses besoins »?
Vers l’âge de 8 semaines, il faut compter en moyenne, une sortie toutes les heures en journée. Ceci signifie que l’on sortira le chiot aux réveils, après les jeux, après les repas, et aussi quand il se met à rechercher son coin de toilette, en reniflant incessamment par terre.
Les capacités de rétention de la vessie d’un chiot ne dépassent pas une heure à l’âge de 8 semaines. La nuit cependant, il est capable de « se retenir » deux à trois heures.
A quel âge un chiot est-il propre ?
La majorité des chiots sont propres entre 3 et 4 mois. Certains mettent plus de temps que d’autres et il faut des conseils individualisés et des médications pour que certains jeunes chiens arrivent enfin à être propres vers l’âge d’un an. Quelques cas plus rares ne sont finalement respectueux de l’appartement qu’aux environ de dix-huit mois.
La propreté du chien âgé, un problème ?
Le chien âgé perd progressivement le contrôle de ses sphincters. Il doit uriner et déféquer dans l’urgence.
De plus, l’arthrose, la douleur articulaire, ne l’incitent guère à se déplacer loin pour éliminer.
Enfin, les problèmes de foie, de rein, et autres organes nobles, entraînent une augmentation de la quantité des urines (et des quantités de boisson).
Le chien âgé élimine de grosses quantités à de courtes distances de son lieu de repos, de repas ou d’activités.
Il faut donc gérer l’espace afin qu’il puisse garder la maison propre. Il convient de le sortir plus souvent qu’un chien adulte, mais tout de même pas aussi souvent qu’un jeune chiot. Interpellez votre vétérinaire afin de déterminer les pathologies physiques cachées de votre vieux chien.
Enfin, le vieux chien peut souffrir de dépression et de confusion, ces deux problématiques q’accompagnant d’une perte des apprentissages acquis durant l’enfance et la vie entière et d’une recrudescence de malpropreté. Une fois traité à l’aide d’une médication adéquates (sélégiline – parlez en avec votre vétérinaire), il faut refaire un apprentissage à la propreté avec les techniques décrites dans ce chapitre.
Conclusions.
La malpropreté est une nuisance qui fait grandement souffrir l’environnement humain de certains chiens. Les techniques efficaces existent, qu’elles soient médicales ou éducatives. Il ne faut pas s’en priver, pour le bien-être de tout le monde, chiens et humains.
Dr Joël Dehasse
Médecin vétérinaire comportementaliste