Pourquoi Rex, qui vient d’atteindre la puberté, ne mange-t-il plus ? Pourquoi Lady est-elle devenue boulimique ? Pourquoi Puce ne mange-t-il que quand ses propriétaires sont présents ? Et pourquoi Cramique ne mange-t-elle que quand ses propriétaires sont absent, de préférence la nuit ? Faut-il donner une fois, deux fois, trois fois par jour, à manger à son chien ou son chat ?
Le comportement de prise d’aliment est quelque chose de complexe. Et très particulier d’une espèce à l’autre. Si manger est, pour l’être humain, un acte social, il en est de même pour le chien. Pour le chat par contre, c’est sans importance.
Le chat
Le chat, pour régler son cas, est un petit mangeur. Il va ingérer des aliments entre dix à quinze fois par jour, pour autant qu’on ne le trompe pas avec des goûts et des saveurs tout le temps variables. Activer l’appétit du chat avec des boites à ceci ou cela, afin qu’il mange « bien », c’est à dire comme on, aimerait qu’il mange, de gros volumes en deux ou trois rations, est anti-écologique. Un chat mange souvent de petites quantités. Il faut respecter sa nature au risque de le rendre anxieux. Oui, c’est un risque réel : un chat qui ne mange que quelques gros repas risque d’avoir de grandes fluctuations de sa glycémie (taus de sucre dans le sang) et se mettre à chasser … des proies inexistantes ou des ersatz de proies comme les chevilles de ses propriétaires, à moins qu’il ne se mette à lécher et téter des tissus, voire à les ingérer. Dès lors, quelques croquettes en self-service, sans changer les goûts, permettront au chat de se ravitailler quand c’est nécessaire.
Le chien
Pour le chien, lui, c’est une autre histoire. Le chien ne mange pas que pour se nourrir, mais aussi pour montrer son rang hiérarchique. En effet, le dominant mange en prenant tout son temps, en savourant, en se montrant ; il lui faut des spectateurs. Le dominé accède au repas après le dominant, il ingère vite sa ration calorique, et être seul n’est nullement incommodant. Tant le dominant que le dominé peuvent défendre leur repas par des grognements ou des morsures. C’est la posture qui fera la différence : le dominant est droit sur ses membres, le dominé est en partie accroupi. Et tant le dominant que le dominé acceptent que le propriétaire vienne toucher à sa gamelle ; seulement le dominant attend de son propriétaire des attitudes basses et une approche lente, tandis que le dominé accepte une approche directe et rapide.
Ne pas manger, l’anorexie, ou manger peu, peut être un signe de trouble comportemental. Une fois que le ou la vétérinaire a fait un examen physique complet et que l’on peut exclure tout trouble corporel, sexuel, émotionnel et affectif, on envisage que le chien veuille jouer un rôle social. Trop d’hormones mâles coupent l’appétit, certaines anxiétés et les dépressions aussi. Mais si ces troubles sont exclus, « pourquoi Médor fait-il le difficile ?» Bien souvent, Médor, à la puberté, a été obligé de rentrer dans la hiérarchie. Ses maîtres n’en savaient rien. Et Médor a joué le jeu de son espèce. Comment obtenir des privilèges en mangeant ? Par la présence de spectateurs. Et Médor s’est décidé à ne manger que si quelqu’un l’accompagnait, le regardait. Bien sûr, ses maîtres se sont inquiétés ; « peut-être Médor est-il malade ? ». On est resté près de lui, on l’a encouragé. Cela a évolué tant et si bien qu’aujourd’hui Médor ne mange qu’à la cuillère et ses trois repas prennent chacun une demi heure.
Pour en finir rapidement, Médor reçoit sa gamelle trois fois par jour pendant 5 minutes ; il mange seul, sans spectateur ; et s’il fait la grève de la faim, tant pis pour lui ; il mangera au repas suivant. Le plus résistant a tenu … 4 jours sans manger ; après finis les caprices, il dévorait tous ses repas !
Manger beaucoup, au-delà de ses besoins en calories, et lorsque la ration est équilibrée, peut être un signe d’anxiété ou de manque de satiété. L’animal anxieux, tout comme l’humain, cherche une façon de s’apaiser. Les comportements dirigés vers soi, surtout vers la bouche, comme manger, boire, se toucher la peau, se ronger les ongles, sont apaisants. Ils induisent dans le cerveau la production de morphines naturelles et l’anxiété s’apaise … temporairement. Ce comportement d’ingestion se substitue à l’angoisse. Et l’animal devient obèse.
Parfois, c’est un manque de satiété qui est la cause du problème. C’est assez typique du chien hyperactif qui ne gère ni ses mouvements, ni ses périodes de repos (très courtes), ni la majorité de ses comportements et particulièrement ses ingestions alimentaires : il pourrait manger deux ou rois rations en une fois, il vole le pain des oiseaux, mange plus vite que son ombre, etc.
Si c’est le cas de votre chien, n’ayez crainte, les vétérinaires intéressés en comportement pourront vous aider.
Les vétérinaires sont les spécialistes du diagnostic des pathologies animales. L’obésité peut faire suite à un diabète, à un excès de calories ingérées, à un trouble anxieux, à de mauvaises habitudes dans le rythme des promenades et des prises d’aliments . Les vétérinaires disposent des moyens médicaux (contre les maladies, comme le diabète, ou contre l’anxiété) et diététiques nécessaires pour faire maigrir un animal obèse, chien ou chat. Des régimes appropriés permettront à votre ami de retrouver une taille svelte sans souffrir et en ayant la sécurité d’avoir tous les nutriments requis pour une bonne santé.
Dr Joël Dehasse
Médecin vétérinaire comportementaliste