Aux Pays-Bas, chez nos proches voisins, il est interdit pour un chien d’agresser un humain ou un animal. C’est la loi. Le ministère responsable a déterminé que trois races de chiens avaient une plus grande probabilité d’agression: le Fila Brasiliero, le Dogue argentin et l’American Staffordshire Terrier.
Les trois races mentionnées ne sont pas interdites de séjour. Il n’est pas interdit de les posséder et les chiens de ces races peuvent circuler librement sur le territoire néerlandais. Cependant un chien de ces races ne peut être reproduit et avoir des chiots, si le test d’agression n’est pas favorable.
Le ministère responsable, c’est à dire le ministère de l’agriculture, a commandité et payé des scientifiques pour développer un test d’agression fiable et scientifiquement validé. C’est à ce projet que se sont attelés Doreen Planta et Willem Netto qui ont publié les résultats de ce test dans Applied Animal Behaviour Science en 1997 (n°52, pages 243-263).
Le test se réalise dans une pièce de tests d’environ 100 mètres carrés avec plusieurs observateurs et expérimentateurs, 8 chiens stimuli (pour observer les agressions sur chiens), un mannequin humain (pour considérer les agressions sur humains), une poupée de 60 cm de haut (pour étudier les agressions sur enfants), une main artificielle (pour constater les agressions lors de contact tactile). Il s’agit d’un test constitué de 43 interventions et / ou manipulations. Cette procédure est compliquée et chère, mais permet une bonne prédictibilité et fiabilité des tests et une bonne concordance avec l’histoire agressive de l’animal.
L’utilisation pratique de ce test peut être remise en question. Cependant, ce test démontre qu’il est possible de développer des outils scientifiques pour étudier la dangerosité prospective de certains individus. D’autres tests plus simples peuvent être dérivés et développés dans l’avenir.
Le choix politique
Si un test scientifique existe, dès lors il est possible de faire une étude extensive des races de chiens sur un critère précis tel que certaines formes d’agressivité ou la dangerosité pour l’être humain. Chaque race pourra alors être représentée par un profil de courbe en cloche, dite courbe de Gauss, comme je l’ai représenté dans l’article du 23 septembre, n°3457. A partir de ces évaluations, on pourrait comparer les races de chiens.
Sans pourtant interdire les races de chiens, il est possible, comme c’est le cas aux Pays-Bas, d’obliger par décret que les géniteurs de races dites à risque, passent un test comportemental. Ainsi on sélectionnera les géniteurs présentant un niveau d’agressivité minime.
Les autorités responsables détermineront quelles sont les races à risque qui devront passer le test, sans exclure l’inclusion de toute race dans l’avenir. L’idéal est que chaque géniteur, quelle que soit sa race, subisse un test de comportement. De cette façon, les races subiront une amélioration génétique au niveau du tempérament.
Ceci n’empêchera pas de devoir socialiser le chiot dans son jeune âge à différents types humains et animaux.
Le Pit Bull
Le Pit Bull terrier américain (qui n’est ni américain ni un terrier) est interdit de séjour aux Pays-Bas, mais comme ce n’est pas une race reconnue par la Fédération Cynologique Internationale, il n’entre pas nommément dans cette loi. Aux Pays-Bas, tout ce qui est croisé de American Staffordshire, tout ce qui ressemble à un Pit Bull et n’a pas les papiers de race pure est un Pit Bull. Un croisement de labrador et de fox terrier pourrait être considéré comme un Pit Bull.
Le Pit Bull est un descendant du Bulldog anglais, qui fut développé entre autres comme chien de famille et comme chien de combat de chiens, sport (à l’éthique discutable) qui s’est développé dans les années 1830 lorsque les combats de chiens et de taureaux furent interdits. C’est à dire que les individus agressifs envers les humains étaient éliminés alors qu’était développée l’agression entre chiens. Mais la question que l’on peut se poser est la suivante: peut-on développer à l’excès une impulsivité agressive seulement sur sa propre espèce (phénomène complètement pathologique pour un animal social pour lequel l’interdit du meurtre du congénère devrait être une priorité) sans que cela n’influence l’agressivité sur d’autres espèces?
Dr Joël Dehasse
Médecin vétérinaire comportementaliste